Le festival des Marquises à Hiva Oa

Le festival des Marquises à Hiva Oa

Posté par : Alain
23 Décembre 2015 à 09h
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N'ayant pas Internet en ce moment et pas avant une bonne semaine, c'est par un récit que je vous présente mon vécu de ce festival. C'est par l'intermédiaire de la
messagerie Iridium que je transmets ce texte à ma fille Sandrine qui se chargera de le mettre sur Facebook et mon Blog

Bien qu'appelé festival des arts des îles Marquises, les Marquisiens n'aiment pas tellement le mot "festival". Ici au Marquises on parle du Matavaa (l'éveil), nom
donné au rassemblement culturel de la terre des hommes.
Biennale culturelle des six îles habitées de la "Terre des Hommes", les Marquises, le Matavaa est le témoin du retour des chants, des danses et mode de vie et surtout
un retour aux traditions ancestrales et croyances de la grande famille Marquisienne. Il faut aussi préciser que tout cela avait été détruit et interdit par l'arrivée
massive des différentes obédiences religieuses (catholiques, protestantes, mormons, adventistes ........) représentées par les missionnaires il y a cela 200 ans
environ.
Cette année  en invités extérieurs, participaient les délégations de Rapa Nui (Île de Paques), Rikitea (Australes de Polynésie Française) et des groupes de
marquisiens de Tahiti.
Le thème de cette édition 2015 était "Haahua i te tumu" qui peut se traduire par le retour à l'essentiel, aux fondamentaux de la culture marquisienne. Donc les
organisateurs avaient demandé aux participants de respecter strictement toutes les danses et chants conformes aux traditions et aux nombreuses légendes présentes ici
aux Marquises. Pas de danses et de concerts modernes.
Que dire de ce Matavaa 2015 que j'ai vécu du 16 au 19 décembre : Grandiose, spectaculaire et magnifique. Arrivé à Hiva Oa, au port de Tahauku le 8 décembre, l'avant
festival avec toutes les préparations a été aussi super.
Toutes les danses étaient accompagnées en musique au son des Pahus (énormes tambours), sauf Rapa Nui avec guitares et accordéon. Même sans le son des Pahus, les
chants des danseurs eux même suffisent à donner le rythme des danses. Un son aigu très spéciale pour les femmes et l'autre très grave des hommes.
Toutes ces danses sont dédiées aux choses de la vie, de part les légendes, l'amour, les guerres entre vallées et îles très nombreuses avant l'arrivée des étrangers.
Le lieu principal du Matavaa, le Tohua Pepeu, est une grande enceinte spécialement aménagée en plein milieu du village principal de Hiva Oa à Atuona, avec des faè
(abris) et murs d'enceintes avec de nombreux Tiki en pierre (statue) et piliers en bois spécialement sculptés par des artistes locaux, un énorme travail de toute la
population. A ces sculptures se sont ajoutés celles offertes par les délégations des autres îles et toutes aussi remarquables les grandes sculptures sur tronc d'arbre
de Rapa Nui  spécialement sculptées durant le festival dans l'espace réservé aux artisans par des artistes de Rapa Nui en de 2 jours seulement et offert à Hiva Oa en
clôture de la soirée danse du vendredi 18. Maintenant, cette espace sacré restera ainsi ! Il est tabu (interdit) de fumer et de boire de l'alcool aussi bien sous les
espaces couvert qu'à ciel libre, d'autres tabus existent, mais pour nous touristes pas toujours bien compréhensibles, d'où certaines remarques ! Même maintenant après
le Matavaa, cela reste applicable.
Si l'ouverture a eu lieu au terrain des sports le mercredi 16 décembre, les danses se sont déroulées également sur 2 autres sites sacrés, au Tohua Upeke au sud ouest
de l'île le vendredi matin  et à Puamau site de Lipona (grand Tiki) nord est de Hiva Oa à 2 heures de piste par 4X4 le samedi matin.
La cérémonie d'ouverture du mercredi 16 fut magnifique. Toutes les délégations sont entrées   sur le stade en défilant tout en dansant, suivi bien sur ici aux
Marquises par une prière catholique en Marquisien. Les discours furent assez rapides dont un prononcé en Marquisien et Français par le jeune président du Matavaa, 30
ans. Le drapeau Français entouré des drapeaux Marquisien et Polynésien ont été hissés sur les chants de la Marseillaise et hymnes Marquisiens et Polynésiens. C'est
l'île de Tahuata qui inaugura les danses, suivi par une plus spectaculaire démonstration de Taki Toa, ensemble Marquisien de Tahiti dont un Haka à faire rougir les
Néo Zélandais, mais par les sous entendus, pas très traditionnel et non conforme au thème de ce Matavaa

Le jeudi 17, c'est dès 8 h le matin au Tohua Pepeu, que commencèrent les activités de danses, d'artisanats et divers arts Marquisiens. Ce jeudi était organisé le
grand Kaikai Katahi (repas communautaire pour tous) uniquement des plats typiquement Marquisiens, je peux vous assurer   que cela était délicieux.
Après avoir vu les jeunes et les tous petits danser, c'est vers 17h30, un peu fatigué que je rentrais sur Frankiz, car le lendemain une longue journée s'annonçait. Donc
je n'ai pas assisté aux danses de 17h qui ont durées jusque minuit, cela fut un régal d'après plusieurs amis.

Le vendredi c'est à 8h sur le Tohua Upeke que se déroulaient les festivités. Fallait être courageux pour y arriver. Lever à 5 h le matin, ensuite rejoindre le village
de Atuona où normalement des navettes nous attendais pour 1/4 d'heure de route dans la montagne, mais voilà l'organisation Marquisienne peut parfois prendre un tour
un peu bizarre, parfois les navettes réservées aux délégations ou officiels et parfois aux touristes, cela donne un peu de pagaille. Donc vers 7 h du matin, tout
seul, j'attendais tranquillement une navette, arrive près de moi un ecclésiastique, que je saluais par "bonjour mon père", il me répondit doucement avec un sourire et
tout près de mon oreille "non, mon seigneur et je m'appelle Pascal". Ben voilà que je fais la connaissance du jeune évêque des Marquises qui lui se fait embarquer par
un ministre polynésien en voiture et bien sur me demande de l'accompagner ! Arrivée au village de Taaoa, il faut rejoindre le site la haut dans la montagne par un
chemin bétonné et très raide. C'est accompagné par Monseigneur Pascal que je rejoins le site, beaucoup de discutions intéressantes entre nous, sur mes plus belles
rencontres et aussi la misère que j'ai pu voir durant mes navigations. Il me rappelle aussi, que c'est un de ses prédécesseurs, Breton comme moi, Monseigneur Le
Cléac'h de St Pol de Léon, où sa famille est bien connue. Cet Evêque par un travail très efficace a convaincu les anciens de contribuer au développement de ce
festival dans les années 1980. Ici aux Marquises la population est très christianisée et les anciens étaient réticents à transmettre leurs connaissances du passé de
par les légendes, probablement la peur de ne pas aller au "paradis" comme leur avaient enseigné les anciens prêtes, ceci dit c'est bien eux qui avaient détruit toute
la culture Marquisienne comme bien d'autres. Monseigneur Pascal, puisque tout le monde l'appelle ainsi, m'annonce qu'il déteste être intégré aux VIP, et préfère
vivre le festival avec les habitants des Marquises et les touristes.
Dans ce site archéologique extraordinaire qu'est le Tohua Upeke, entouré d'une végétation luxuriante dont certains arbres tricentenaires, les démonstrations de chants
et danses furent magiques, parfois sous une pluie diluvienne, les chants guerriers et même d'amour comme la danse de l'oiseau, ici vous donnaient parfois des frissons
avec toute la résonance qui se produisait dans cette montagne !
L'après midi fut longue, car cela à commencé au Tohua Pepeu vers 15h pour se terminer vers minuit par une majestueuse démonstration de danse de Rapa Nui, plus
virevoltante, surtout les hommes et bien sur en tenues traditionnelles donc les hommes vêtus uniquement d'un cache-sexe ! Qu'elle étaient belles les danseuses !
Disons qu'entre 19h et minuit c'est les meilleures dansent de tout le festival que nous avons pu voir.

Le samedi 19, seulement une partie des délégations et représentants officiels se déplacèrent sur le site de Tohua Lipona à Puamau, 2 heures de 4x4 sur une piste
pouvant être dangereuse parfois, donc les autorités prirent beaucoup de précautions.
L'après midi, dès 14h30 débutèrent les festivités de clôture par diverses danses, beaucoup plus décontractées où parfois les délégations se mêlèrent entre elles pour
danser et surtout lors des danses amoureuses de l'oiseau où certains jeunes danseurs venaient provoquer les danseuses, bien sur tout cela dans une ambiance amicale et
fantastique. C'est vers 18 heures que se terminait le Matavaa par un hymne prière Marquisien, plutôt ancestral que chrétien.

Voilà ce que je peux vous raconter de ce Matavaa, plein les yeux, beaucoup d'émotions, des moments gravés dans ma mémoire,  oui un festival où nous étions quelques
privilégiés à avoir  pu assister. Oui encore, ce Matavaa se mérite, d'abord il faut y venir, soit par mer et cela n'est pas une croisière "s'amuse" soit par air et
cela est un voyage long, épuisant et coûteux à la fois. Cela se mérite, car parfois c'est debout ou assis sur des pierres posées au sol ou servant de marche, sous un
soleil de plomb entrecoupé d'averses diluviennes. Mais au final cela restera marqué à jamais dans nos mémoires. Oh je pourrais encore écrire des lignes et des lignes
sur ce   Matavaa, je pense avoir dis l'essentiel pour vous permettre de l'imaginer et d'en rêver peut être
Pour vous dire, Hiva Oa est peuplé d'environ 2000 habitants et l'estimation durant le festival est environ 4000 personnes délégations et touristes inclus. Donc vous
voyez que ce n'est pas un festival comme peut l'être le  festival inter celtique de Lorient. Ce festival est d'abord fait pour eux les Marquisiens, pour qu'ils se
retrouvent entres eux, pour qu'ils retrouvent leur identité et leur culture ancestrale. Malheureusement, plusieurs habitants des autres îles aimeraient y assister,
mais cela demanderait une énorme logistique de transport et de logement. Bravo aussi à la Marine pour l'aide apportée en logistique de transport par le remorqueur
Ravi et le patrouilleur Arago, sur lequel j'ai passé une journée merveilleuse en compagnie du Commandant Marco Aureli qui fut un de mes équipier lorsque je régatais
en Bretagne. Et oui le monde est petit, même ici nous faisons des rencontres parfois imprévues !
Il faut noter aussi cette ambiance extraordinaire et cette joie de vivre lors de ce festival où toute vente et consommation d'alcool étaient interdites entre les
dimanche 13 et  20 décembre sur tout le lieu du Matavaa, c'est à dire pratiquement tout Hiva Oa ! Comme quoi cela dément tout ce qui peut être dit sur la nécessité de
l'alcool pour pouvoir s'amuser ! Le résultat est sans appel : pas un problème, pas une rixe, aucun débordement que de la joie et la bonne humeur !

Désolé, mais pour l'instant je ne peux pas mettre de photo pour vous présenter ce festival, pas ou très peu d'internet. Dès que j'ai une bonne connexion je vous
partage ce Matavaa en photo. Mais en vous connectant sur ce site, vous pourrez voir les meilleures prestations : www.festivalmarquises2015.pf

Rendez vous en 2019 à Ua Pou pour le futur grand festival, si certains ont des envies de naviguer dans le Pacifique ou de voyager, mais dans ce dernier cas je vous
conseil déjà de réserver un gîte car cela devrait se remplir très vite. Pour les voiliers, faut savoir que le port de Ua Pou ne peut contenir qu'une douzaine de
voiliers, et encore, ici nous étions une soixantaine répartis sur plusieurs mouillages.

Alain

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